octobre 2024

La Responsabilité du Conseiller en Investissements Financiers!

La responsabilité de votre conseiller en investissements financiers!

Par Maître Philippe Fournier le 2 novembre 2024

A la lumière du récent scandale du groupe Emera AM Solstice à Toulouse

De nombreux investisseurs perdent les économies de leur vie du fait des conseils parfois hasardeux de professionnels de la finance ! Ces particuliers ont fait confiance à leur « homme d’affaires » et s’aperçoivent trop tard de leur erreur.

Bien sûr, la plupart des conseillers financiers sont des professionnels rigoureux et responsables mais malheureusement comme dans toute profession certains sont beaucoup scrupuleux !

Certains de ces conseillers conseillent à leurs clients investisseurs d’investir tout ou partie de leurs économies dans des sociétés, aux termes d’opérations complexes et risquées. Au bout de quelques années, lesdites sociétés connaissent des difficultés financières et disparaissent par le jeu des procédures de liquidation judiciaire en cascade.

Ces opérations sont très diverses.

Il peut s’agir d’investir sous couvert de développement durable d’investir dans des centrales photovoltaïques ou dans des stations Biogaz au moyen de véhicules juridiques parfois complexes et sans sécurité : des sociétés en participation (SEP), des sociétés en nom collectif (SNC), ou encore simplement des sociétés commerciales plus classiques (SAS). Avec l’argent des investisseurs, ces véhicules juridiques acquièrent des matériels ou toutes sortes de biens qui vont être donnés en exploitation à d’autres sociétés, moyennant un loyer ou avec la promesse d’une plus-value sur le montant investi souvent alléchante.

Malheureusement, les scandales récents, dont la presse se fait peu l’écho, montrent que les sociétés exploitantes déposent le bilan. S’ensuivent des procédures de liquidation judiciaire en cascade au détriment des investisseurs qui perdent non seulement le capital investi mais également tous les rendements promis. Plus de 900 investisseurs sont concernés à Toulouse !

Il peut également s’agir d’investissements défiscalisant en Loi Girardin dans les DROM. L’investisseur acquiert des actions d’une société qui acquiert un outil industriel ou commercial. Ces derniers disparaissent parfois sans même que l’investisseur en soit informé et lorsqu’il apprend, il est trop tard, l’argent a disparu.

Reste la responsabilité du conseiller en investissement financier (CIF) qui a conseillé ces opérations hasardeuses sans tenir compte de ce que demandait réellement l’investisseur en termes financiers…

Le CIF est pourtant une profession strictement réglementée par le Code Monétaire et Financier et placée sous le contrôle de l’Autorité des Marchés Financiers.

Le CIF doit notamment respecter les prescriptions de l’article L541-8-1 de ce Code :

« Les conseillers en investissements financiers doivent :

1° Agir d’une manière honnête, loyale et professionnelle, servant au mieux les intérêts des clients;

2° Exercer leur activité, dans les limites autorisées par leur statut, avec la compétence, le soin et la diligence qui s’imposent, au mieux des intérêts de leurs clients, afin de leur proposer une offre de service adaptée et proportionnée à leurs besoins et à leurs objectifs ;

3° (…)

4° Se procurer auprès de leurs clients ou de leurs clients potentiels, avant de formuler un conseil mentionné au I de l’article L. 541-1, les informations nécessaires concernant leurs connaissances et leur expérience en matière d’investissement en rapport avec le type spécifique d’instrument financier, d’opération ou de service, leur situation financière et leurs objectifs d’investissement, de manière à pouvoir leur recommander les opérations, instruments financiers et services d’investissement adaptés à leur situation.

(…) ;

8° Veiller à ce que toutes les informations, y compris les communications à caractère promotionnel, adressées à leurs clients, notamment leurs clients potentiels, présentent un contenu exact, clair et non trompeur. »

Le CIF doit donc proposer des placements financiers adaptés à la situation personnelle de l’investisseur.

Les articles 325 et suivants du Règlement Général de l’AMF l’oblige à remettre un certain nombre de documents en amont de ses conseils :

  • Un document d’entrée en relation (DER)
  • Une lettre de mission
  • Une déclaration d’adéquation à chaque investissement proposé.

Le CIF est donc soumis à une obligation de conseil renforcée réaffirmée récemment par la Cour de cassation (Cour de cassation du 15 juin 2022, N°20-21.588) :

“Il résulte de ces textes que, avant de formuler un conseil, le conseil en investissement financier doit s’enquérir auprès de ses clients de leurs connaissances et de leur expérience en matière d’investissement, ainsi que de leur situation financière et de leurs objectifs d’investissement, de manière à pouvoir leur recommander les opérations, instruments et services adaptés à leur situation. Lorsque les clients ne communiquent pas les informations requises, les conseillers en investissements financiers s’abstiennent de leur recommander les opérations, instruments et services en question. (…)

En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si Mme [B] justifiait avoir exécuté son obligation de conseil adapté à la situation personnelle de M. et Mme [E], la cour d’appel a privé sa décision de base légale.”

Dans ce même arrêt, sur un second moyen, la Cour juge :

« (…) il incombe à celui qui est tenu d’une obligation de conseil de rapporter la preuve de son exécution (…) »

Pour la Cour, il appartient donc au CIF en cas de problème de rapporter la preuve qu’il a exécuté correctement son obligation de conseil en ayant proposé des placements adaptés à la situation personnelle de l’investisseur. La Cour opère donc un renversement de la charge de la preuve à la charge du CIF et en faveur de l’investisseur.

Les choses ne sont pas irrémédiables ! Venez consulter votre avocat pour connaître vos droits !

Le point sur la clause de non concurrence de votre contrat de travail

Le point sur la clause de non concurrence de votre contrat de travail!

Par Philippe Fournier, le 1er Octobre 2024

Votre contrat de travail contient une obligation de non concurrence.

1/ Quelles sont les conditions de validité d’une clause de non concurrence ?

Une telle obligation est une restriction à votre liberté de travailler. La jurisprudence accepte ce type de clause à la condition que cette restriction soit proportionnée et raisonnable au regard de l’intérêt que l’employeur tient à protéger.

Pour être valable, une obligation de non concurrence doit répondre à 4 conditions principales :

          Elle doit être indispensable à la protection des intérêts de l’entreprise

          Elle doit limitée dans le temps et l’espace

          Elle doit tenir compte des spécificités de l’emploi du salarié

          Elle doit comporter l’obligation de verser au salarié une contrepartie financière.

Une clause d’une durée supérieure à un an doit donc vous alerter.

La délimitation dans l’espace doit correspondre à une réalité. Sans parler des clauses qui définissent un périmètre « Monde entier » totalement contestables, la mention « France entière » doit être strictement appréciée au regard des intérêts de l’entreprise à protéger. 

Bien définir l’activité de l’entreprise à protéger. Trop souvent, l’activité de l’entreprise est rédigée de manière tellement large que le salarié, après la rupture de son contrat, ne peut plus proposer ses services dans de nombreux domaines, sauf à saisir le juge.

Alors que les conditions ci-dessus sont parfaitement connues de la plupart des employeurs, on constate encore trop souvent de clauses partiellement ou totalement illégales.


2/ Qui peut invoquer sa nullité ?

Seul, le salarié peut invoquer la nullité d’une clause de non concurrence. Si l’une des conditions n’est pas remplie, la clause sera inopposable au salarié. En conséquence, le salarié ne sera pas tenu de respecter l’obligation de non concurrence.

Certaines clauses de non concurrence peuvent être assorties d’une clause pénale en cas de non-respect par le salarié. Au-delà de sa vocation dissuasive pour le salarié, il y a lieu d’être particulièrement vigilant quant à la rédaction de ce type de clause qui peuvent révéler une situation déséquilibrée. Comme toute clause pénale, le juge peut intervenir pour la diminuer voire la supprimer.

 

3/ Est-elle applicable en cas de démission ? Que se passe-t-il si l’employeur accepte de réduire le préavis du salarié en cas de démission ?

La clause est applicable en cas de licenciement ou en cas de démission.

En cas de dispense de préavis, la clause joue dès le départ effectif du salarié de l’entreprise. Ce point a été jugé par la Cour de cassation le 13 mars 2013[1] :

« Mais attendu qu’en cas de rupture du contrat de travail avec dispense d’exécution du préavis par le salarié, la date à partir de laquelle celui-ci est tenu de respecter l’obligation de non concurrence, la date d’exigibilité de la contrepartie financière de la clause de non concurrence et la date à compter de laquelle doit être déterminée la période de référence pour le calcul de cette indemnité sont celles du départ effectif de l’entreprise ; qu’il en résulte que l’employeur qui dispense le salarié de l’exécution de son préavis doit, s’il entend renoncer à l’exécution de la clause de non concurrence, le faire au plus tard à la date du départ effectif de l’intéressé de l’entreprise, nonobstant stipulations ou dispositions contraires ; »

Il a même été jugé que, sauf disposition particulière contenue dans la clause de non concurrence, cette dernière restait valable en cas de rupture de la période d’essai même s’il convient de noter que la jurisprudence n’est pas tout à fait alignée sur ce point.

 

4/ L’employeur peut-il renoncer au bénéfice de la clause de non concurrence ?

L’employeur ne peut invoquer la nullité de la clause mais il peut y renoncer si :

          Le contrat de travail prévoit cette faculté.

          S’il se conforme strictement à la procédure qu’il a lui-même stipulée.

La Cour de cassation a jugé le 13 mars 2006 en cas de démission d’un salarié[2] :

« Mais attendu que l’article 9 du contrat de travail dispose que la société pourra renoncer à faire usage de la clause de non concurrence en prévenant l’employé par écrit dans un délai de 8 jours suivant la notification de la rupture de son contrat de travail ; qu’ayant constaté que la clause de non concurrence n’avait pas été levée dans les huit jours de la notification de la rupture, la cour d’appel a décidé à bon droit que le salarié était en droit d’en réclamer la contrepartie financière, peu important la date de départ effectif du salarié ; que le moyen n’est pas fondé ; »


5/ Quelle est la prescription applicable si l’employeur ne verse pas la contrepartie financière prévue dans la clause de non concurrence ?

En droit social, et en matière de versement de la contrepartie financière, la prescription est de 3 ans. Donc, vous avez 3 ans pour réclamer ces sommes. Il reste que mieux vaut le faire sans tarder.

Le délai de forclusion de 6 mois du solde de tout compte n’est pas applicable à la contrepartie financière de la clause de non concurrence. Il ne concerne que les sommes mentionnées dans le reçu. Par ailleurs, le délai est de 6 mois à compter de la signature du salarié.


Faîtes valoir vos droits ! Venez nous consulter !


[1] Cour de cassation, chambre sociale, 13 mars 2013, N°11-21.150

[2] Cour de cassation chambre sociale, 15 mars 2006, N°03-43.102

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