Le point sur la clause de non concurrence de votre contrat de travail!
Par Philippe Fournier, le 1er Octobre 2024
Votre contrat de travail contient une obligation de non concurrence.
1/ Quelles sont les conditions de validité d’une clause de non concurrence ?
Une telle obligation est une restriction à votre liberté de travailler. La jurisprudence accepte ce type de clause à la condition que cette restriction soit proportionnée et raisonnable au regard de l’intérêt que l’employeur tient à protéger.
Pour être valable, une obligation de non concurrence doit répondre à 4 conditions principales :
– Elle doit être indispensable à la protection des intérêts de l’entreprise
– Elle doit limitée dans le temps et l’espace
– Elle doit tenir compte des spécificités de l’emploi du salarié
– Elle doit comporter l’obligation de verser au salarié une contrepartie financière.
Une clause d’une durée supérieure à un an doit donc vous alerter.
La délimitation dans l’espace doit correspondre à une réalité. Sans parler des clauses qui définissent un périmètre « Monde entier » totalement contestables, la mention « France entière » doit être strictement appréciée au regard des intérêts de l’entreprise à protéger.
Bien définir l’activité de l’entreprise à protéger. Trop souvent, l’activité de l’entreprise est rédigée de manière tellement large que le salarié, après la rupture de son contrat, ne peut plus proposer ses services dans de nombreux domaines, sauf à saisir le juge.
Alors que les conditions ci-dessus sont parfaitement connues de la plupart des employeurs, on constate encore trop souvent de clauses partiellement ou totalement illégales.
2/ Qui peut invoquer sa nullité ?
Seul, le salarié peut invoquer la nullité d’une clause de non concurrence. Si l’une des conditions n’est pas remplie, la clause sera inopposable au salarié. En conséquence, le salarié ne sera pas tenu de respecter l’obligation de non concurrence.
Certaines clauses de non concurrence peuvent être assorties d’une clause pénale en cas de non-respect par le salarié. Au-delà de sa vocation dissuasive pour le salarié, il y a lieu d’être particulièrement vigilant quant à la rédaction de ce type de clause qui peuvent révéler une situation déséquilibrée. Comme toute clause pénale, le juge peut intervenir pour la diminuer voire la supprimer.
3/ Est-elle applicable en cas de démission ? Que se passe-t-il si l’employeur accepte de réduire le préavis du salarié en cas de démission ?
La clause est applicable en cas de licenciement ou en cas de démission.
En cas de dispense de préavis, la clause joue dès le départ effectif du salarié de l’entreprise. Ce point a été jugé par la Cour de cassation le 13 mars 2013[1] :
« Mais attendu qu’en cas de rupture du contrat de travail avec dispense d’exécution du préavis par le salarié, la date à partir de laquelle celui-ci est tenu de respecter l’obligation de non concurrence, la date d’exigibilité de la contrepartie financière de la clause de non concurrence et la date à compter de laquelle doit être déterminée la période de référence pour le calcul de cette indemnité sont celles du départ effectif de l’entreprise ; qu’il en résulte que l’employeur qui dispense le salarié de l’exécution de son préavis doit, s’il entend renoncer à l’exécution de la clause de non concurrence, le faire au plus tard à la date du départ effectif de l’intéressé de l’entreprise, nonobstant stipulations ou dispositions contraires ; »
Il a même été jugé que, sauf disposition particulière contenue dans la clause de non concurrence, cette dernière restait valable en cas de rupture de la période d’essai même s’il convient de noter que la jurisprudence n’est pas tout à fait alignée sur ce point.
4/ L’employeur peut-il renoncer au bénéfice de la clause de non concurrence ?
L’employeur ne peut invoquer la nullité de la clause mais il peut y renoncer si :
– Le contrat de travail prévoit cette faculté.
– S’il se conforme strictement à la procédure qu’il a lui-même stipulée.
La Cour de cassation a jugé le 13 mars 2006 en cas de démission d’un salarié[2] :
« Mais attendu que l’article 9 du contrat de travail dispose que la société pourra renoncer à faire usage de la clause de non concurrence en prévenant l’employé par écrit dans un délai de 8 jours suivant la notification de la rupture de son contrat de travail ; qu’ayant constaté que la clause de non concurrence n’avait pas été levée dans les huit jours de la notification de la rupture, la cour d’appel a décidé à bon droit que le salarié était en droit d’en réclamer la contrepartie financière, peu important la date de départ effectif du salarié ; que le moyen n’est pas fondé ; »
5/ Quelle est la prescription applicable si l’employeur ne verse pas la contrepartie financière prévue dans la clause de non concurrence ?
En droit social, et en matière de versement de la contrepartie financière, la prescription est de 3 ans. Donc, vous avez 3 ans pour réclamer ces sommes. Il reste que mieux vaut le faire sans tarder.
Le délai de forclusion de 6 mois du solde de tout compte n’est pas applicable à la contrepartie financière de la clause de non concurrence. Il ne concerne que les sommes mentionnées dans le reçu. Par ailleurs, le délai est de 6 mois à compter de la signature du salarié.